Cette semaine, notre éditorial analyse la situation du VIH/SIDA et de la maladie à virus Ebola (MVE) qui touchent particulièrement l’Afrique sub-saharienne. De nombreux défis restent à relever pour une participation effective des communautés. Il reste que la fracture entre les professionnels de santé et les populations reste encore très grande.
Au-delà la phase aigüe de la maladie, les patients guéris présentent de nombreuses séquelles tant psychologiques que physiques. Nous rapportons un article de l’OMS sur le sujet. Enfin, une série d’articles vous sont présentées sur les politiques et le financement de la santé dans les pays à faible et moyen revenu
Nous vous souhaitons une bonne fin de semaine.
Bonne Lecture
Basile Keugoung
Edito : 1er décembre 2014, quelle commémoration de la Journée mondiale de lutte contre le SIDA à l’ère d’Ebola ?
Par Basile Keugoung
Ebola
1. WHO (Feature story from Sierra Leone)– Sierra Leone: aider les survivants d’Ebola à tourner la page
http://www.who.int/features/2014/post-ebola-syndrome/fr/
Alors que la flambée de la maladie à virus Ebola (MVE) prend de l’ampleur et se propage, un groupe restreint quoique tangible est également en train de grandir: celui des survivants d’Ebola. Ils ressortent sous le choc d’une expérience décrite par un survivant comme l’«antichambre de l’enfer» et la vie qui les attend n’est pas simple à la sortie du centre de traitement Ebola.
Les survivants d’Ebola témoignent à la conférence des survivants de Kenema en Sierra Leone. Dans la communauté, certains les traitent de «sorciers» parce qu’ils ont survécu. Nombre d’entre eux n’ont pas retrouvé les visages qu’ils avaient si hâte de revoir pendant leur lutte pour la survie au centre de traitement Ebola. Maris, femmes, enfants, frères, sœurs, mères et pères, tous ont été emportés vers des tombes sans nom par la maladie à virus Ebola.
«J’apprends à mener une nouvelle vie à la maison, sans mon mari ni mes deux enfants. La maison est tellement vide, surtout la nuit», explique Fatimata Gaima, qui s’est accrochée à la vie lorsqu’elle était à l’hôpital, prête à tout pour rentrer chez elle et prendre soin de son enfant de trois ans. Mais, alors qu’elle était en convalescence, ce qu’elle craignait le plus est arrivé: son dernier enfant a été amené à l’hôpital, ses résultats d’analyse ont indiqué qu’il était atteint du virus Ebola et il est mort quelques jours plus tard. Mme Gaima a raconté son histoire au sein d’un petit groupe lors de la première conférence des survivants d’Ebola, organisée par l’UNICEF et l’agence humanitaire GOAL à Kenema, l’une des premières régions touchées par la flambée de maladie à virus Ebola en Sierra Leone. La réunion avait pour objectif de cerner les besoins des survivants (sur le plan physique, psychologique, social et économique), ainsi que de les aider à envisager la façon dont ils pourraient contribuer à combattre la flambée du virus Ebola en Sierra Leone.
Des services pour les survivants apparaissent peu à peu. Dans un dispensaire post-Ebola, mis sur pied pour répondre aux besoins psychologiques et sociaux des survivants, il est apparu clairement que les séquelles physiques de la maladie font partie des problèmes les plus urgents auxquels sont confrontés les survivants d’Ebola.
«Beaucoup de patients arrivent avec des problèmes de vue», déclare le Dr Margaret Nanyonga, agent d’accompagnement psychosocial pour l’OMS à Kenema. «Certains se plaignent de voir trouble, mais pour d’autres, la perte de vision est progressive. Nous avons rencontré deux cas de personnes qui sont devenues aveugles.»
Le Dr Nanyonga explique que les personnes souffrant de ce qu’elle appelle le «syndrome post-Ebola» présentent un éventail de symptômes. Ceux-ci avaient déjà été constatés chez des survivants des flambées précédentes et entraînent un handicap à long terme. À part les problèmes de vue, qui touchent environ 50% des survivants d’Ebola à Kenema, les patients se plaignent de «douleurs corporelles», par exemple de douleurs articulaires, musculaires et thoraciques.
Ils souffrent également de céphalées et de fatigue extrême, ce qui les empêche de reprendre la vie qu’ils menaient auparavant en tant que fermiers, ouvriers et femmes au foyer, surtout si leur métier impliquait des travaux manuels.
Il faut plus d’informations sur le syndrome post Ebola.
«Nous devons comprendre pourquoi ces symptômes persistent, s’ils sont causés par la maladie ou par le traitement, ou éventuellement par la désinfection en profondeur», dit le Dr Nanyonga, qui a mis sur pied un outil d’évaluation qui sera utilisé afin d’établir les symptômes les plus répandus et les plus handicapants, ainsi que pour déterminer ce qu’on peut faire pour aider les survivants à surmonter ces problèmes.
Le Dr Andrew Ramsay, coordonnateur sur le terrain pour l’OMS à Kenema, explique qu’il est essentiel que les problèmes physiques et psychologiques potentiellement handicapants soient diagnostiqués et, lorsque cela est possible, traités au plus vite.
Politiques et Financement de la santé
2. BMC – Investir dans les systèmes de santé pour la couverture sanitaire universelle
Titre original: Investing in health systems for universal health coverage in Africa
L Sambo et al.;
http://www.biomedcentral.com/1472-698X/14/28/abstract
Cette étude porte sur les 47 États membres de l’OMS Afro. Les objectifs spécifiques étaient de préparer une synthèse sur la situation des composantes systèmes de santé, d’ analyser la corrélation entre les interventions liées aux Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et des systèmes de santé, et de donner un aperçu de quatre grands axes de progrès vers la couverture sanitaire universelle.
Méthodes
Le cadre des six composantes des systèmes de santé de l’OMS et les OMD liés à la santé ont été utilisés pour analyser les données. Les données pour les indicateurs sélectionnés ont été obtenus à partir des statistiques pour la santé mondiale de l’OMS de 2014 et l’Observatoire mondial de la santé.
Les densités moyennes de la Région africaine de médecins, de personnel infirmier et des sages-femmes, le personnel de la dentisterie, le personnel pharmaceutique et les psychiatres sont de 2,6 ; 12 ; 0,5 ; 0,9 et 0,05 pour 10 000 habitants étaient environ cinq fois, deux fois, cinq fois, cinq fois et six fois plus faible que la moyenne mondiale.
Cinquante-six pour cent des pays ont moins de 11 postes de santé pour 100 000 habitants, 88% avaient moins de 11 centres de santé pour 100 000 habitants, 82% avaient moins d’un hôpital de district pour 100 000 habitants, 74% avaient moins de 0.2 hôpitaux provinciaux pour 100 000 habitants, et 79% avaient moins de 0,2 hôpitaux tertiaires pour 100 000 habitants.
Environ 83% des pays avaient moins d’un IRM par million d’habitants et 95% avaient moins d’une unité de radiothérapie par million d’habitants. Quarante-six pour cent des pays n’a pas adopté la recommandation du Groupe de travail international sur les financements innovants à passer au moins 44 US$ par personne et par an pour la santé. Certaines de ces lacunes dans les composants du système de santé ont été fortement corrélés à des lacunes de la couverture des interventions pour la santé maternelle (OMD 5), la santé infantile (OMD 4) et le VIH / SIDA, la tuberculose et le paludisme (OMD 6).
Des écarts importants existent dans les systèmes de santé et l’accès aux interventions de santé liés aux OMD. Il est impératif que les pays adoptent l’engagement de Luanda de 2014 sur la couverture sanitaire universelle en Afrique comme leur vision à long terme et le sauvegarder avec les politiques et les plans adéquates, avec des feuilles de route clairement ancrées sur le renforcement des systèmes nationaux de santé et les déterminants sociaux de la santé.
3. Bulletin OMS (online) – Réponse à la prolifération des bailleurs dans le secteur de la santé au Ghana: une étude de cas qualitative
Titre ornal: igResponses to donor proliferation in Ghana’s health sector: a qualitative case study
S W Pallas et al.;
http://www.who.int/bulletin/online_first/BLT.14.141614.pdf?ua=1
Cette étude évalue comment les bailleurs et les agences gouvernementales ont répondu à la prolifération des bailleurs dans le secteur de la santé au Ghana entre 1995 et 2012.
Au total, 39 entretiens ont été réalisés. Les participants incluaient les bailleurs, les responsables du niveau central du Ministère de la santé et des Agences gouvernementales. Leur sélection était raisonnée pour avoir une diversité des participants des 3 types d’institutions. Les données collectées des entretiens ont été comparées avec celles de la revue documentaire.
La réponse du Ghana à la prolifération des bailleurs a été la création de l’approche sectorielle, une migration vers l’appui budgétaire, l’institutionnalisation du groupe de travail santé et l’anticipation du retrait de certains bailleurs suite au changement de statut de pays à faible à pays à revenu intermédiaire.
Les principaux facteurs étaient l’importance du leadership et du soutien politique, l’internalisation des normes d’harmonisation, l’alignement et l’appropriation, la tension entre les différentes méthodes utilisées pour améliorer l’efficacité de l’aide et un changement vers la redevabilité unidirectionnelle de la performance du système de santé.
Ainsi, entre 1995 et 2012, le niveau central du Ministère de la santé et les bailleurs ont réagi à la prolifération des bailleurs en promouvant l’harmonisation et l’alignement. Même si cela a réduit les coûts de transaction pour le gouvernement, cela a augmenté les coûts pour la coordination des bailleurs et a aussi réduit les options de négociation pour le gouvernement. En même temps, l’alignement et l’harmonisation ont amené certains bailleurs à revenir à l’approche projet pour renforcer la transparence et l’identification de l’impact des interventions.
4. Global Health Action –Evaluation de l’impact des interventions électroniques dans les pays à faible et moyen revenue: qu’est-ce qui a marché?
Titre original: Assessing the impact of mHealth interventions in low- and middle-income countries – what has been shown to work?
C S Hall et al.;
http://www.globalhealthaction.net/index.php/gha/article/view/25606
Les outils électroniques mobiles à faible cout tels que les téléphones mobiles, les tablettes et les appareils numériques qui offrent l’accès à la voix et aux données ont révolutionné l’accès à l’information et à la communication dans le monde. Ces matériels ont un grand impact sur plusieurs aspects de la vie depuis le commerce jusqu’à l’éducation et la santé. Cet article fait la revue de l’évidence actuelle de l’impact des technologies mobiles sur la santé dans les pays à faible et moyen revenu à travers la perception des détenteurs d’enjeux.
Une revue de littérature a été effectuée en utilisant des termes spécifiques dans PubMed, Google Scholar et la littérature grise. Un total de 676 articles ont été revus et 76 articles ont été retenus pour l’analyse.
Il y a de plus en plus d’évidences sur l’efficacité des interventions utilisant les technologies mobiles sur la santé dans les pays à faible et moyen revenu. Il s’agit de l’amélioration de l’adhérence au traitement, les rappels des rendez-vous, la collecte des données, et le développement des réseaux de soutien. Toutefois, la qualité de l’évidence reste encore faible.
Il reste à élargir les expériences pilotes qui ont montré des résultats satisfaisants à une plus grande échelle, et en même temps mener des études plus rigoureuses pour renforcer la qualité des évidences.