Par Bertrand Livinec 

Initiative Panafricaine de Lutte contre les Hépatites

Quel est l’impact des inégalités de revenus sur l’épidémie du VIH ? Cette question est cruciale en Afrique sub-saharienne qui est la Région du monde la plus affectée par la pandémie du VIH/SIDA.

Le 21 février 2014, The Body publiait un article mettant en évidence la juxtaposition des taux de pauvreté et des taux de prévalence au VIH dans la ville de New-York.

Il y a également un une corrélation assez significative de l’ordre de 0,7 entre les taux de prévalence au VIH dans les différents Etats américains et le coefficient de Gini (indicateur du degré d’inégalité dans une société).

On remarque aussi que des taux de prévalence VIH particulièrement élevés s’observent dans les pays d’Afrique Australe qui sont parmi les pays les plus inégalitaires au monde.

Dans un autre article daté de juillet 2012 « The HIV-poverty thesis re-examined: poverty, wealth or inequality as a social determinant of HIV infection in sub-Saharan Africa? », l’auteur présente une étude basée sur 170 régions de 16 pays africains et indique que «vivre dans une région avec une plus grande inégalité de richesse a été significativement associé à une augmentation du risque individuel d’infection à VIH ».

Un autre article avait précisé en 2000 que « l’examen de l’histoire économique et politique ainsi que des politiques récentes d’ajustement structurel économique mettent en évidence la synergie mortelle entre la pauvreté et le sida dans le continent africain ».

Au cours des dernières décennies, les politiques des grandes institutions internationales ont plutôt été de favoriser la dérégulation, la libéralisation économique et les ajustements structurels avec des conséquences dramatiques  sur l’aggravation des inégalités.

Cette pensée a fortement influencé les politiques menées en Afrique et l’un des résultats probants est de constater des inégalités très élevées sur le continent, y compris dans l’accès aux soins. Dans ce contexte, on notera deux publications récentes intéressantes qui semblent faire opposition à cette culture très libérale :

– un l’article (février 2014). En parlant des programmes d’ajustement structurels mis en œuvre, un article publié en février 2014 (The political origins of health inequity: prospects for change)  a précisé :

«Ces programmes impliquèrent l’implémentation des principes de base du néolibéralisme, y compris la promotion de marchés libres, la privatisation des biens publics et des programmes (y compris les soins de santé), la réduction des états, et la dérégulation économique. Beaucoup de recherches ont montré que les effets de ces programmes ont eu des conséquences désastreuses pour la santé publique. »

– Le SIDIIEF et le REFIPS (mars 2014) prennent position pour demander « l’urgence d’agir en promotion de la santé : un appel à des politiques socio-économiques responsables face à la santé des populations ». Leur communiqué indique notamment :

« Force est de constater qu’une marginalisation socio-économique associé ainsi aux facteurs de risque et aux conséquences des maladies chroniques et non transmissibles contribuent à creuser les inégalités de santé. Selon une étude Suisse, les pays développés consacrent 70% de leur budget de santé au seul traitement des maladies chroniques ». Le SIDIIEF et le REFIPS recommandent notamment « Aux gouvernements de repenser l’organisation des soins et des services en intégrant la promotion de la santé au cœur des politiques sanitaires et sociales, ainsi que des programmes culturellement adaptés qui tiennent compte du contexte socio-économique propre à chaque pays ».

L’Afrique n’atteindra pas les Objectifs du Millénaire pour le Développement en 2015. En effet, on observe encore une forte morbidité et mortalité pour des problèmes de santé que l’on pouvait prévenir et/ou traiter. Aujourd’hui, la couverture sanitaire universelle est à l’agenda des politiques de santé mondiales et pourrait être incluse dans les Objectifs de développement post-2015. L’atteinte de la couverture sanitaire universelle exige une réduction significative des inégalités. Ces inégalités sont géographiques, ethniques, financières, ou liées au genre, à la profession…

Il est donc urgent que des changements de direction soient effectués, sur les politiques macro-économiques pour réduire les inégalités et sur les politiques de santé pour faciliter l’accès aux soins et services de santé à tous et surtout aux populations et groupes vulnérables.

Ainsi, les programmes de santé en général et celui du VIH en particulier devraient mettre en place des stratégies qui facilitent le dépistage, le diagnostic et le traitement des cas au sein des populations et groupes vulnérables. Pour cela, les politiques internationales de santé devraient être contextualisées au niveau national, et celles du niveau national adaptées au niveau de chaque région. Enfin, au niveau district, l’analyse de la situation d’accès aux soins permettrait d’identifier les populations et groupes vulnérables, d’élaborer des stratégies appropriées et de mettre en œuvre des activités spécifiques.

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