Edito : Formation médicale et programmes de santé : pourquoi le décalage en Afrique sub-saharienne ?

Des séminaires et autres ateliers de formation sont organisés chaque année par les programmes de lutte contre les problèmes spécifiques à l’intention des professionnels de santé. Ceci est louable car participe au renforcement des capacités et à l’amélioration des compétences pour la prise en charge desdits problèmes.

En effet, de nombreux facteurs justifient la nécessité d’une formation continue : l’émergence de nouveaux problèmes d’une part et l’évolution technologique qui se traduit par la découverte de nouveaux moyens diagnostiques et thérapeutiques d’autre part. Ainsi, après la graduation, le professionnel de santé doit être régulièrement recyclé pour être à jour et offrir des soins de qualité.

Seulement, la stratégie des séminaires et ateliers de formation pose de plus en plus de problèmes sur le terrain (Ridde, 2010). Même le professionnel nouvellement sorti de l’école a besoin du séminaire pour offrir le paquet de soins essentiels dans la communauté où il va travailler. Bien que le paludisme soit l’affection qui a le plus fort taux de morbidité et de mortalité, que le VIH/SIDA soit connu depuis une trentaine d’années, il faudra encore un séminaire sur les directives de prise en charge du paludisme, un comité thérapeutique pour prescrire les ARV de première ligne par exemple dans certains pays.

La multiplicité des séminaires et parfois leur chevauchements font que l’essentiel  pour certains est d’assister au séminaire et de signer la feuille de présence pour bénéficier du perdiem.  Valéry Ridde qualifie à juste titre ce phénomène de « perdiemite » (Ridde, 2010).

L’une des raisons essentielles est que les programmes de formation initiale ne se sont pas suffisamment adaptés à l’évolution des problèmes de santé et de la technologie sanitaire. Une synergie entre les programmes de santé qui sont au parfum des résultats de la recherche en santé et les écoles de formation n’a pas été construite pour favoriser cette adaptation continue des programmes. Par rapport à la recherche, celle-ci a été décrite comme étant très faible en Afrique sub-saharienne.  Enfin, la régulation de la formation des professionnels de santé par les pouvoirs publics est faible, et les moyens ne sont pas mis en place pour contrôler l’adéquation entre problèmes de santé-programmes de formation-qualité du prestataire formé.

La qualité de la formation initiale est primordiale. Le rôle de l’Etat est essentiel pour garantir une formation de qualité adaptée au contexte national tant dans les institutions publiques que privées. En plus, des mécanismes nouveaux tels que les accréditations régulières, la diffusion régulière de l’information scientifique aux prestataires de soins, et des évaluations continues seraient utiles pour renforcer l’apprentissage continue dans le secteur de la santé en Afrique sub-saharienne.

Ridde V (2010) Per diems undermine health interventions, systems and research in Africa : burying our heads in the sand. Tropical Medicine and International Health.

N’hésitez pas à nous donner votre point de vue.

Bonne lecture

Isidore Sieleunou et Basile Keugoung

 

Global Health Policy & Financing

1.Lancet – Five reasons to fund the Global Fund

The Lancet ; http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(11)61526-2/fulltext
Le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme est à un carrefour. Le panel d’experts de haut niveau indépendant sur le contrôle fiduciaire et les mécanismes de surveillance au sein du Fonds a déposé son rapport final. Ce panel a été mis en place en Mars pour regarder la manière dont le Fonds opère suite aux différentes allégations de fraudes des subventions dans plusieurs pays bénéficiaires. Le rapport du comité fait six recommandations générales. Il demande au Fonds de passer  de l’urgence à une réponse durable, de renforcer la gouvernance interne, de rationaliser son processus d’approbation des subventions, d’élaborer et adopter un nouveau cadre de gestion des risques, de responsabiliser les cadres intermédiaires de décision et de se concentrer sur les résultats.

Les changements nécessaires au sein du Fonds sont clairement importants. Pour les donateurs, il y a de bonnes raisons à maintenir le financement du fonds mondial : Premièrement, il sauve des vies. Deuxièmement, le Fonds donne un large retour sur l’investissement plus que tout autre mécanisme de financement de la santé mondiale. Troisièmement, sans l’appui continu et accru, les progrès sur l’atteinte des OMD seront réduits, et même inversés. Quatrièmement, aucune autre organisation multilatérale, n’est aussi transparente au sujet des allégations de corruption, les rendant publiques et même prenant rapidement des mesures pour enquêter. Cinquièmement, il est sensible aux critiques et s’est engagé continuellement pour une amélioration. En réponse au rapport du panel, le Fonds a mis en place des plans pour accélérer les réformes organisationnelles en son sein.
Comme le rapport du comité le souligne: “Echec du Fonds mondial serait une catastrophe sanitaire mondiale. “C’est une catastrophe que la communauté sanitaire mondiale ne doit pas permettre qu’elle arrive.

2.BMJ (news) – GAVI rolls out vaccines against child killers to more countries

Peter Moszynski; http://www.bmj.com/content/343/bmj.d6217.full
L’Alliance mondiale pour les vaccins et l’immunisation (GAVI) a annoncé qu’elle fournira un financement pour introduire des vaccins contre les rotavirus  dans 16 pays en développement et des vaccins anti-pneumococciques dans  18 pays en développement.

Les rotavirus sont la première cause de diarrhées chez les enfants de moins de 5 ans et  50% de décès liés à ces rotavirus sont africains toujours selon GAVI.

Les pneumocoques sont responsables de la pneumonie, la méningite et une septicémie et tuent également plus d’un demi-million d’enfants chaque année dans le monde.

Le Directeur de l’alliance GAVI a remercié les partenaires et a souligné le fardeau des maladies évitables par la vaccination sur la croissance économique des pays. En 2015, l’Alliance GAVI prévoit d’appuyer plus de 40 pays les plus pauvres du monde pour  le déploiement de vaccins contre le rotavirus et les pneumocoques. Le Soudan, le Nicaragua, la Bolivie, le Guyana et le Honduras ont déjà introduit les  vaccins contre le rotavirus, avec le soutien de l’alliance.

Margaret Chan, Directrice générale de l’OMS  a déclaré qu’il y a une augmentation de la demande des nouveaux vaccins  et que l’OMS va apporter différents appuis aux pays.

Le Directeur de l’UNICEF, Anthony Lake a insisté sur la nécessité de donner la priorité aux enfants qui sont les plus vulnérables.

3.Scidev.net- Support local governance to get research into policy

Justin Parkhurst; http://www.scidev.net/en/science-communication/influencing-policymakers/opinions/support-local-governance-to-get-research-into-policy-1.html
Pour voir les résultats de la recherche qu’ils financent dans l’action, les donateurs devraient travailler avec la bonne gouvernance locale et non les réseaux informels, écrit Justin O. Parkhurst

Les bailleurs de fonds exigent de plus en plus des chercheurs d’avoir  un impact des travaux de recherche qu’ils financent dans les pays en développement par leur prise en compte dans les politiques et la mise en œuvre effective de leurs résultats.

Une façon pour les chercheurs d’attirer l’attention sur leurs résultats est de tisser des liens avec des personnes très influentes, souvent dénommés «entrepreneurs politiques». Il a été démontré qu’ils peuvent jouer un rôle important et informel  pour mettre les questions de recherche sur les agendas des décideurs, ou faire avancer le processus d’élaboration des politiques.

Mais il ya un problème clé pour cette stratégie qui n’est pas exactement un modèle de bonne gouvernance.
La bonne gouvernance signifie que les décisions politiques répondent à diverses préoccupations sociales et sont prises de manière transparente, par les dirigeants qui peuvent être tenus responsables pour la population locale.
Oui, nous voulons nous assurer que ces dirigeants utilisent la meilleure preuve possible lorsqu’ils prennent leurs décisions, mais ce n’est pas aux chercheurs de s’assurer que leurs conclusions sont celles sur lesquelles les décisions politiques sont fondées.
Si les donateurs font une pression – par l’attribution des fonds de recherche basés sur l’impact des politiques – ils inciteront les chercheurs à prioriser leurs propres idées sur celles des personnes dans les pays où ils travaillent.

 

4.WHO – Closing the gap: Policy into practice on social determinants of health – Policy into Practice on Social Determinants of Health

sdhconference – Discussion-paper-EN.pdf (PDF 2MB)
Du 19 au 21 Octobre 2011, se déroulera la première Conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé. Cet événement fournira un cadre mondial pour dialoguer sur la manière de faire progresser les recommandations de 2008 de la Commission de l’OMS sur les déterminants sociaux de la santé. En se basant sur les expériences nationales, ce document se focalise sur les procédures et les connaissances techniques pour agir au niveau des déterminants sociaux de la santé et réduire les inégalités en matière de santé.

La conférence visera à catalyser une action mondiale coordonnée dans cinq domaines principaux:

  • La gouvernance pour s’attaquer aux causes fondamentales des inégalités en matière de santé: mise en œuvre de l’action sur les déterminants sociaux de la santé;
  • Le rôle du secteur de la santé, et surtout des programmes de santé publique, pour réduire les inégalités en matière de santé;
  • La promotion de la participationcommunautaire pour agir sur les déterminants sociaux;
  • L’action mondiale sur les déterminants sociaux: alignement des priorités et des parties prenantes;
  • Le suivi des progrès: mesurer et analyser pour orienter les politiques sur les

5. Lancet – Women and Health Initiative: integrating needs and response

Ana Langer, Julio Frenk & Richard

La nécessité d’améliorer le statut et libérer le potentiel des femmes et des filles dans le monde est de plus en plus reconnue comme un impératif de développement. Ainsi la santé des femmes et des enfants a de nouveaux émergé comme une priorité au niveau mondial et de nouvelles approches stratégiques sont nécessaires pour la mettre en avant. C’est dans ce but que l’Ecole de santé publique d’Harvard à entrepris de mener une action à l’échelle mondiale : Women  and Health Initiative. Cette action vise à identifier et à promouvoir les approches efficaces qui permettent d’éliminer les barrières entres les sexes et améliorer l’expérience des femmes à la fois comme consommatrices de soins mais aussi comme fournisseurs. Comme nous l’avons dit, cette approche relève d’un impératif moral et constitue une stratégie essentielle vers la réalisation des objectifs mondiaux et nationaux de développement.

6. BMJ (editorial)  – Seeking a better world for women and girls

Janice Du Mont & Deborah White; http://www.bmj.com/content/343/bmj.d5712.full
L’oppression généralisée des femmes et des filles représente l’une des plus grandes injustices de notre temps. En effet, Les violences faites aux femmes et les complications (souvent évitables) durant la grossesse et l’accouchement sont associées à un risque accru de dépression, d’anxiété, de suicide, de maladie chronique et de décès. Ils constituent également une atteinte aux droits fondamentaux et aux libertés humaines. Pendant plusieurs décennies, ces problèmes ont été documentés, et les programmes, les campagnes, les politiques, les lois, les conventions et les traités ont  été conçus pour les éliminer.

En s’appuyant sur l’ouvrage de Nicholas Kristof et Sheryl WuDunn « Half the Sky: Turning Oppression into Opportunity for Women Worldwide », cet article nous montre que les progrès réalisés dans ce domaine sont loin d’être suffisants et constituent un véritable plaidoyer en faveur d’actions visant à stopper les abus et les négligences envers les femmes.

NCD summit follow up

7.  Smart Global Health – Reflections on the UN High-Level Meeting on Noncommunicable Diseases

J. Stephen Morrison; http://www.smartglobalhealth.org/blog/entry/reflections-on-the-un-high-level-meeting-on-noncommunicable-diseases/
Dans son article, J. S. Morrison commente le contenu du Sommet des Nations Unies de haut Niveau portant sur les maladies non transmissibles qui s’est tenu le 19 et 20 Septembre 2011. Pour l’auteur, les espoirs étaient grands chez les participants que ce sommet soit un tournant historique comme le fut le sommet de l’ONU en 2001 en mettant un coup de projecteur sur le VIH/SIDA. Ce sommet visait à mettre en avant des actions à fort impact pour lutter contre le diabète, le cancer du poumon, les maladies cardiaques et à porter une attention accrue sur leurs principaux facteurs de risque : tabac, alcool, mauvaise alimentation et inactivité.

Cet article fait un état des lieux des différentes conclusions de ce sommet et montre que, bien loin de constituer un tournant historique, elles seraient presque le reflet d’un échec avec la mise en lumière de résultats mitigés et le plus souvent prévisibles.

Emerging Voices

8. BMC Health Services Research – The use of reproductive healthcare at commune health stations in a changing health system in Vietnam

Ngo D. Anh & Peter S. Hill; AbstractPDF 
Sur la base des reformes du secteur de la santé engagé par le gouvernement du Vietnam,  Ngo D. Anh & Peter S. Hill tentent de mettre en exergue les effets  de cette reforme orientée vers le pluralisme.  Cette étude décrit le modèle  d’utilisation des services de la santé reproductive du  planning familial chez les femmes dans les Centres de santé communaux  et dans les autres structures sanitaires et explore par la même occasion les déterminants sociodémographiques de l’utilisation des services de santé de la reproduction au niveau des centres communaux de santé. La méthodologie utilisée s’appuie sur une enquête transversale menée dans la province de Thua Thien Hué et dans les provinces de Vinh Long, basée une technique multi-étapes d’échantillonnage en grappes. Il ressort fondamentalement des conclusions de leur étude qu’au delà d’une utilisation accrue des centres de santé communaux publics par les femmes, les structures privées sont fortement utilisées pours les soins prénatals par ces femmes malgré les faibles moyens qu’elles disposent. Il en est également pour les hôpitaux de districts. L’étude met en exergue la question de la qualité des soins dans les structures publiques et la perception de la population que le niveau supérieur et le privé offrent les meilleurs soins.

Malaria

9. HP&P – A path to an optimal future for the Affordable Medicines Facility – malaria

O Sabot, M Gordon, B Moonen, A Talisuna and G Amofah, abstract on health policy
La question de la disponibilité des médicaments à moindre coûts a été toujours au cœur des débats. Celle liée au paludisme semble trouver une solution. En effet, O Sabot, M Gordon, B Moonen, A Talisuna and G Amofah dans un article reviennent sur  une proposition en 2004, de l’Institute of Medicine  qui proposait que le prix des polythérapies à base d’artémisinine (ACT), traitement antipaludique le plus efficace dans de nombreux pays, serait subventionné à la sortie de l’usine afin de les rendre disponible mais également à des prix aussi abordables.
Cette proposition avait suscité un débat. Les sceptiques de la subvention ont  fait savoir que cette proposition n’aurait pas  l’impact recherché  car les intermédiaires s’approprieraient les bénéfices et  les patients les  plus pauvres n’auraient pas  accès aux médicaments au niveau des pharmacies privées et un gaspillage serait enregistré au niveau de ceux qui n’auront pas besoin (Oxfam International 2009; Kamal-Yanni 2010). Pour les partisans de la subvention,  les forces du marché permettraient  de garantir des prix abordables et une grande disponibilité. Après négociation et de compromis significatifs, la subvention pour des médicaments à moindre coût a été adoptée et l’un des compromis les plus importantes était que l’AMFm ne commencerait pas comme une initiative mondiale, mais serait plutôt «piloté» à l’échelle nationale dans les pays d’endémie palustre sélectionnés avec une évaluation approfondie de cette phase initiale.

Development & Aid

10. CGD – What Happens When Donors Fail to Meet Their Commitments?

Owen Barder & Rita Perakis; http://blogs.cgdev.org/globaldevelopment/2011/09/what-happens-when-donors-fail-to-meet-their-commitments.php
La déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide au développement prise en 2005 et le plan d’action d’Accra en 2008 avaient pour objectif fondamental d’ assurer une efficacité de l’aide au développement face aux interventions tous azimuts des donateurs sans une coordination de cette aide. Sur cette base, les donateurs avaient pris un certain nombre d’engagements et de principes pour assurer le succès de cette déclaration. Cependant, plus de dix après, les choses ne semblent pas évoluer dans ce sens ce que dénoncent Owen Barder & Rita Perakis en pointant du doigt le non respect des engagements de la part des donateurs. Pour les auteurs, Il ne faudrait pas s’étonner de la lenteur des progrès de la déclaration de Paris car le système d’aide représente un compromis entre les intérêts des donateurs et des bénéficiaires, ajoutés aux intérêts propres des organisations et des organismes intermédiaires. Et selon les auteurs, ces avantages politiques et institutionnels pour les bailleurs de fonds semblent l’emporter sur les inconvénients de l’inefficacité de l’aide au développement d’autant plus que les personnes qui souffrent de cette inefficacité de l’aide n’ont pas voix dans les pays donateurs. Ils préconisent donc un engagement international pour résoudre ce problème.

 

Ont contribué à l’édition de cette lettre: Mohamed Ali Ag Ahmed, Matthieu Antony, Morris de Kouame

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