Chers Collègues,

 

La question du financement des systèmes de santé a retenu notre attention cette semaine. En effet, le financement fait partie des six composantes –Leadership et gouvernance ; financement ; ressources humaines ; équipements, médicaments et autres intrants ; offre de soins ; et système d’information sanitaire- d’un système de santé bien fonctionnel tel que défini par l’OMS. Ce financement n’est pas seulement l’octroi des fonds, mais va de la collecte des fons, la mise en commun et l’achat des soins et services de santé offerts à la population. Le financement représente une composante centrale qui intervient sur les 5 autres. Mais au regard des systèmes de santé à faible revenu, le financement constitue l’un des maillons faibles qui contribue à la faiblesse de ces systèmes de santé et à l’incapacité d’offrir un accès universel aux soins à tous. Ceci pourrait d’ailleurs expliquer pourquoi les objectifs globaux de santé sont rarement atteints dans ces pays. Car comment pourrait-on offrir la ‘santé pour tous en l’an 2000’, ‘mettre sous ARV 3 million de personnes vivant avec le VIH en 2005’, ‘réduire de ¾ la mortalité maternelle et infantile d’ici 2015’ si plus de 40% de la population est pauvre et vit dans des systèmes où le recouvrement des coûts est la principale source de financement ? Ces populations pauvres qui sont les plus à risque sont soit exclues de l’accès aux soins ou sont sujettes aux dépenses catastrophiques qui les rendent plus pauvres et donc encore plus susceptibles à la maladie. Beveridge et Bismarck avaient montré dès le 19e siècle les 2 principales voies à suivre, et comme elles ne sont pas contradictoires, la réalité montre que c’est la combinaison des deux à des proportions diverses qui est la clé du succès pour le financement des soins dans les pays riches. En inventant le recouvrement des coûts en 1987, l’Initiative de Bamako a créé une grosse épine qui sera difficile à extirper malgré les dégâts qu’elle produit par rapport aux ressources additionnelles qu’elle apporte. Les campagnes pour la gratuité des soins ne produisent malheureusement pas suffisamment d’écho et elles mériteraient de s’orienter vers des arrangements institutionnels qui combinent les concepts de Beveridge et Bismarck.

Bonne Lecture

Basile Keugoung, Isidore Sieleunou, David Hercot, Kristof Decoster, Josefien Van Olmen, & Wim Van Damme


Global Health

 

1. Globalization and health – Framing health and foreign policy: lessons for global health diplomacy

Ronald Labonte & Michelle Gagnon; http://www.globalizationandhealth.com/

Labonte et Gagnon passent en revue les arguments de santé dans la politique extérieure qui guident la diplomatie de la santé mondiale. Ceux-ci sont organisés autour de six piliers politiques : sécurité, développement, biens publiques mondiaux, commerce, droits de l’homme et raisonnement éthique/moral. Chacun de ces piliers ayant des implications sur la façon dont la santé mondiale comme issue de politique extérieure est conceptualisée. Le but de leur analyse est d’améliorer l’équité dans la santé mondiale. Leur conclusion est que « la plupart des états, même lorsque engagés dans la santé comme but de politique extérieure, continuent toujours de prendre des décisions essentiellement sur la base “de la haute politique“ de sécurité nationale et des intérêts économiques. Le développement, les droits de l’homme et les arguments éthiques/moraux pour l’aide à la santé mondiale, la traditionnelle “basse politique“ de la politique extérieure, sont présents dans les discours mais ne semblent pas dominer la pratique ».  Pendant que l’élan politique pour la santé comme but de politique extérieure persiste, l’encadrement de ce but demeure ainsi une issue contestée.

 

2. HPP – The evolution, etiology and eventualities of the global health security regime

Steven J Hoffman; http://heapol.oxfordjournals.org/cgi/content/abstract/czq037

La gouvernance de la sécurité mondiale en santé est devenue primordiale aujourd’hui. Par exemple, les scientifiques avaient prédit que le virus pandémique influenza affecterait 1,5 milliard de personnes, près de 150 million de décès et induirait 3 milliards US$ de dépenses. Une urgence sanitaire dans un pays affecte d’autres pays en quelques heures. L’évolution de la régulation de la sécurité mondiale en santé a connu 4 périodes :

–         Les régulations de mise en quarantaine (1371-1851)

–         Les Conférences sanitaires (1851-1892

–         Les Conventions sanitaires internationales et les Organisations sanitaires internationales (1892-1946)

–         Le leadership de l’OMS (1946-…)

L’OMS fait face aujourd’hui à la globalisation, l’évolution de la diplomatie avec la prolifération des organisations internationales chargées de la sécurité en santé, les nouveaux instruments (lois, droits de l’homme) et les nouvelles menaces (bioterrorisme).

Avec cette évolution, de nouvelles configurations de pouvoir sont possibles incluant une plus grande autorité de l’OMS, une combinaison d’acteurs aux pouvoirs divers, l’action des pays en voie de développement et les organisations de la société civile. Cette connaissance permettrait de savoir où agir pour faire face aux défis futurs.

DH : Il existe une hypothèse de travail qui n’est pas soulevée ici, que l’influence de l’OMS soit réduite et que les décisions se prennent dans d’autres lieux tel que le G20, le H8, … ou en de multiples endroits en fonction des enjeux, des alliances et des luttes de pouvoirs.

3. FP – China & the Global Fund: a rebuttal

Drew Thompson And Jia Ping ; http://www.foreignpolicy.com/articles/2010/08/20/dollar_diplomacy_can_be_healthy_for_china

D‘un point de vue de politique extérieure, se voulant une réfutation aux raisonnements de Jack Chow qui pense que l’appétit Chinois pour les milliards de Dollar d’aide (pour la lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme) est fallacieux dans sa caractérisation et vient aux dépens des pays d’Afrique sub-saharienne, Thompson et Ping développent trois arguments pourquoi le Fonds Mondial devrait continuer à soutenir la Chine :

–         l’aide au développement n’est pas un jeu à somme nulle ;

Tout en reconnaissent que la Chine peut et devrait investir plus de ressources propres pour répondre à ses besoins de santé publique, les auteurs attirent l’attention que l’aide au développement ne devrait pas être vue comme un jeu à somme nulle où un destinataire bénéficie aux dépens des autres. Le Fonds Mondial é
tant une organisation basée sur la performance, attribuant ses subventions sur la base du besoin individuel et de la qualité des propositions, en exigeant des récipiendaires des mécanismes de transparence, de responsabilité, et de bonne gouvernance, la Chine comme tout autre pays devrait en bénéficier si elle respecte ces règles du jeu.

–         le financement du Fonds Mondial peut contourner les obstacles du système publique géré par le gouvernement pour améliorer la santé ;

Depuis 2004 les ressources du Fonds Mondial ont été déployées rapidement et efficacement dans presque 3.000 localités de la Chine, aidant ainsi le pays à reconstruire son système de santé, qui a spectaculairement échoué durant la crise du SRAS en 2002-2003.

–         le dialogue diplomatique

Les fonds globaux représentent un dialogue entre le gouvernement chinois et la communauté internationale, et non simplement un moyen d’écouler l’argent de l’aide. L’interaction fournit une opportunité unique de promouvoir des valeurs universelles telles que la transparence, la responsabilité et l’inclusion par des processus démocratiques.

Il est donc particulièrement important à l’heure des vives tensions bilatérales et multilatérales – notamment sur les questions des droits de l’homme, du Tibet, de Taiwan, de la souveraineté maritime et du commerce – que les Etats-Unis et la communauté internationale montrent qu’ils font bon accueil de la participation de la Chine aux processus internationaux, et cherchent son acceptation à la validation des normes de cette communauté telles que celles embrassées par le Fonds Mondial.

4. GHP – Should China Continue to Receive Aid?

Devi Sridhar; http://www.globalhealthpolicy.net

Dans un blog, Sridhar présente ses observations sur la position de Thompson et Ping qui soutiennent que le Fonds Mondial devrait continuer à aider la Chine.

Pour Sridhar chacun des trois arguments développés par Thompson et Ping est discutable. Elle développe des idées pour les contester. Selon elle, un intense plaidoyer doit être fait pour que les ressources limitées, destinées à l’aide, aillent dans les pays qui en ont le plus besoin tels que le Malawi, Haïti, le Niger, dont les gouvernements luttent pour répondre aux besoins fondamentaux de leurs populations, et  les intérêts des pays donateurs ne devraient en aucun cas être prioritaires.

5. Irin – UGANDA: Optimism as PEPFAR increases funding

http://www.plusnews.org/

PEPFAR s’est engagé à augmenter son appui au programme Ougandais de prise en charge du VIH. Dans un récent blog sur la situation ougandaise, Eric Goosby a annoncé cette encourageante nouvelle : « PEPFAR augmentera son aide financière à court et à moyen terme pour permettre de combler le fossé durant cette période ».

Favorablement accueillie, cette décision devra permettre entre autre de maintenir le rythme d’inclusion des patients en attente sur les listes de prise en charge, mais aussi d’encourager les populations à se faire dépister pour une prise en charge précoce aux ARV.

 

6. HPP – The World Health Report 2000: expanding the horizon of health system performance

Julio Frenk; http://heapol.oxfordjournals.org/

Julio Frenk revient sur le Rapport sur la Santé dans le Monde 2000, dix ans après sa publication. Il récapitule une partie des principales inquiétudes exprimées par les gouvernements après la publication de ce rapport, à savoir :

–         l’OMS devrait rapporter les figures que produisent les gouvernements sans les corriger ;

–         l’OMS devrait utiliser uniquement les données de sources officielles ;

–         l’OMS ne devrait pas présenter les mesures composites que la plupart des personnes ne peuvent pas comprendre ;

–         l’OMS ne devrait pas comparer les pays les uns aux autres parce que ceci peut embarrasser certains gouvernements ;

–         les données sont d’une telle mauvaise qualité que les mesures composites sont invalides ;

–         l’OMS ne devrait pas estimer les données manquantes ;

–         c’est réductionniste d’employer un simple chiffre pour caractériser les performances d’un système de santé ;

Frenk voit un certain nombre de contributions conceptuelles dans ce rapport, justifie pourquoi l’OMS devrait poursuivre cet exercice et résume en quatre raisons principales l’utilité d’avoir revisité le Rapport sur la Santé dans le Monde 2000 :

1-      soutenir l’intérêt pour la santé globale par la démonstration des résultats liés aux investissements accrus dans ce domaine ;

2-     établir des solides connaissances basées sur ce qui marche réellement et qui devrait être partagé à travers différent pays en tenant compte de la faisabilité culturelle, politique et financière ;

3-     soutenir le développement de la capacité nationale de penser et agir globalement aux systèmes de santé ;

4-     favoriser les valeurs de transparence et de responsabilité comme éléments essentiels de la gouvernance démocratique aux niveaux nationaux et au niveau mondial.

 

7. HPP – WHR 2000 to WHR 2010: what progress in health care financing?

Di McIntyre; http://heapol.oxfordjournals.org/ 

Dans un autre commentaire sur le Rapport sur la Santé dans le Monde 2000 dans Health Policy and Planning, Di McIntyre se focalise sur 3 cadres conceptuels et des chemins à prendre pour booster la performance des systèmes de santé, notamment en ce qui concerne la question du financement des soins de santé.

–         Le 1er cadre conceptuel et probablement la plus grande contribution du Rapport de 2000 a été l’utilisation d’un cadre référentiel du financement de la santé qui est devenu actuellement un modèle pour la présentation des leçons et expériences internationales, mais encore mieux, pour le pilotage sur les réflexions et la planification au niveau national.

–         La seconde contribution conceptuelle s’est axée autour de la notion “de l’équité du financement `’, relevant le fait que les systèmes de santé n’ont pas seulement pour rôle d’améliorer l’état de santé. La promotion de l’équité à travers des dispositions de financement du système de santé a une valeur sociale plus large.

–         Le troisième cadre découle de ce que le rapport 2000 a marqué le début d’un effort concerté de quitter des payements directs pour évoluer vers des mécanismes de prépaiement des soins de santé.

Si le rapport 2000 a assurément apporté une contr
ibution importante pour cristalliser la pensée sur le financement des soins de santé, trop peu de changements sont malheureusement notés à ce jour. McIntyre relève l’abondance des défis qui demeurent dans le financement de la santé en Afrique Sub-saharienne et discute certains d’entre eux, notamment :

–         Le besoin d’adopter une perspective systémique plus large plutôt que de se concentrer sur une problématique spécifique (par exemple la réduction des paiements directs)

–         La nécessité d’une augmentation des ressources de la santé à travers les ressources nationales plutôt qu’internationales

–         L’atteinte d’un accès universel aux soins dans un contexte dominé par le secteur informel

Access

8. AJPH – Innovative Approaches to Reducing Financial Barriers to Obstetric Care in Low-Income Countries

Fabienne Richard, Sophie Witter and Vincent de Brouwere; http://ajph.aphapublications.org/cgi/reprint/AJPH.2009.179689v1

Le faible accès aux soins de qualité est l’obstacle principal pour réduire la mortalité maternelle dans les pays à faible revenu. Dans beaucoup de régions, les femmes doivent payer directement de leur poche pour accéder aux soins, ayant pour résultats les retards dans la prise en charge, mortels pour certaines, poussant des ménages dans la pauvreté du fait des dépenses catastrophique pour d’autres. Pour améliorer l’accès aux soins, diverses approches innovatrices ont été utilisées et ont soit ciblées les pauvres, soit exemptées certains services spécifiques, telle que la césarienne.

Richard et al. explorent ces approches innovatrices en analysant 8 études de cas dans les pays à faible revenu (Ghana, Senegal, Guinée, Mauritanie, Burkina-Faso, Cambodge, Inde, Bolivie) pour mieux comprendre les expériences courantes de la réduction des barrières financières aux soins maternels.

Bien que l’utilisation des services augmentent dans la plupart des endroits, les auteurs trouvent que les soucis demeurent au sujet de la qualité des soins, de l’équité entre les patientes riches et pauvres et entre les résidantes urbaines et rurales, et la soutenabilité financière de ces nouvelles stratégies. Pour eux, l’expérience des pays tels que la Malaisie et le Sri Lanka montre que les ingrédients principaux pour le long terme passent par l’engagement local, la persévérance et l’adaptabilité avec le temps, une approche holistique qui prend en compte les barrières de l’offre et de la demande, et une attention sur l’assurance universelle en tant que but final, si ce n’est immédiat. Cet article fait suite à une large étude réalisée en Afrique de l’Ouest dont les résultats ont été publiés en Français ici.

MDG

9. CGD – Who Are the MDG Trailblazers? A New MDG Progress Index – Working Paper 222

Benjamin Leo and Julia Barmeier; http://www.cgdev.org/content/publications/detail/1424377

En prélude au sommet de l’ONU sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement qui se tiendra ce mois de septembre à New York, une évaluation effectuée par le ‘Center for Global Development’ analyse les progrès réalisés par chaque pays. Le Honduras, le Laos, l‘Ethiopie, l’Ouganda, le Burkina Faso, le Nepal, le Cambodge et le Ghana bien qu’étant pauvres ont fait des progrès spectaculaires. Les pays – Afghanistan, Burundi, RDC, Guinée Bissau- en conflits traînent toujours la patte. Entre ces 2 catégories, les autres pays font des progrès bien que ceux-ci soient encore trop faibles pour leur permettre d’atteindre les objectifs en 2015.


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