Chers lecteurs,
Nous vous souhaitons d’excellentes fêtes de Noël et de Nouvel an 2013. Une pensée pour ceux qui souffrent et pour ceux qui ont perdu des êtres chers. Cette semaine, Théophane Bukele présente une analyse de la Résolution de l’ONU sur la couverture universelle santé. Nous vous offrons une Lettre légère qui comporte 3 articles. Le premier porte sur le financement du paludisme en Afrique, le second sur les estimations des décès dus au paludisme et le dernier sur le cadre d’analyse des arrangements institutionnels dans le secteur de la santé.
Bonne lecture
Editorial
L’Assemblée générale de l’ONU choisit la couverture universelle santé
par Théophane Bukele Kekemb, MPH, Ph.D. ABD
Le 12 décembre 2012, après deux mois d’intenses négociations entre les Etats membres, l’Assemblée Générale des Nations-Unies (AGNU) a approuvé une résolution sur la Couverture Universelle de Santé (CUS). A travers cette résolution, l’AGNU invite les Etats membres à valoriser la contribution de la CUS à la réalisation de tous les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). L’AGNU demande urgemment aux gouvernements, aux organisations de la société civile et aux organismes internationaux de favoriser l’inclusion de la CUS comme un important élément dans l’agenda international du développement et de la mise en œuvre de la objectifs de développement convenus au niveau international, notamment les OMD, en tant que moyen de promouvoir une croissance durable. […]
1. Devex – La lutte contre le paludisme en Afrique: un déficit de 3,6 milliard US$
Titre original : In Africa’s malaria fight, a $3.6B funding gap
https://www.devex.com/en/news/blogs/malaria-in-africa-needs-3-6b
Il y a aujourd’hui un déficit de 3.6 milliard US$ pour la prise en charge du paludisme en Afrique a souligné Roll Back Malaria lors de sa 23e réunion qui s’est tenue le 7 décembre 2012 à Dakar (Sénégal). Ceci pourrait affecter les progrès réalisés jusqu’ici pour la lutte contre le paludisme. Huit pays méritent aujourd’hui une attention particulière : Nigeria, République centrafricaine, Cote d’Ivoire, République Démocratique du Congo, Ethiopie, Mauritanie, Niger et Sierra Leone. Ces 8 pays ont besoin pour les deux prochaines années de 2.4 milliard US$ pour inverser la courbe aujourd’hui croissante du paludisme.
Au Nigeria par exemple, le paludisme est responsable de 30% des cas de décès infantiles. Le Comité exécutif de Roll Back Malaria a invité les gouvernements et les partenaires pour assurer le financement du paludisme dans ces 8 pays et s’est engagé à rechercher des financements innovants tels que les transactions financières, les taxes sur les billets d’avion pour augmenter les ressources contre le paludisme.
2. Estimation de la mortalité liée au paludisme: une nécessité pour une approche consensuelle
Titre original : Malaria mortality estimates: need for agreeable approach
http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/tmi.12020/pdf
Yazoune Ye, Catherine Kyobutungi, Bernhards Ogutu, Leopoldo Villegas, Diadier Diallo, Halidon Tinto, Abraham Oduro and Osman Sankoh
La publication des données de la mortalité due au paludisme dans le Lancet par l’IHME (Institute of Health Metrics and Evaluation) a déclenché diverses réactions des scientistes du paludisme. En effet, les chiffres de l’IHME étaient très différents de ceux publiés par l’OMS. Bien qu’ayant différents chiffres de mortalité due au paludisme, l’OMS et l’IHME s’accordent sur le fait que les efforts coordonnés ont eu un impact sur la réduction de la mortalité liée au paludisme.
Le débat sur les chiffres de mortalité liée au paludisme a eu un répit, ce ne devrait pas être le cas. Pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement 4 et 6, il est crucial d’avoir une estimation optimale de la mortalité liée au paludisme, ce qui pourrait aider à évaluer l’impact des stratégies de contrôle de cette maladie.
Cet article va nous aider à éviter la dichotomie dans l’estimation de la mortalité palustre dans le futur.
Dans les zones d’endémie palustre, l’information concernant les décès liés au paludisme manque. La majorité des décès ont lieu à domicile et plusieurs d’entre eux sont inhumés sans être vus par un personnel qualifié. Il sera donc difficile dans ces conditions de déterminer le nombre de décès et même leurs causes.
Beaucoup d’argent est utilisé pour la lutte contre le paludisme, il est donc inadmissible que l’on ne puisse pas donner de manière précise les statistiques concernant la mortalité liée au paludisme. Le débat entre les hommes de sciences a été limité à la critique de la méthodologie utilisée, ils ne s’accordent pas sur une méthodologie qui donne des statistiques fiables. Cette confusion est une menace pour les acquis en stratégie de contrôle du paludisme. Il devient donc inacceptable que l’on décède de paludisme et que la cause reste une énigme.
Un bon Système d’Information Sanitaire pourrait offrir des données fiables concernant la mortalité liée au paludisme. On sait aussi que cette mortalité est faible si le système sanitaire fonctionne bien.
Les stratégies basées sur la population telles le système de surveillance sanitaire et démographique doivent être encouragées, ceci dans le but de rapporter les décès qui ont lieu en dehors des formations sanitaires. L’autopsie verbale (AV) en est une des méthodes, même comme elle présente des limites. Les outils utilisés par l’ autopsie verbale pourraient être révisés pour améliorer sa sensibilité dans la détection des décès liés au paludisme.
Le manque de consensus sur la méthode d’estimation du poids du paludisme est un défi pour la santé publique. Les hommes de sciences doivent y apporter une réponse.
par Gaston Wamba
3. Health Policy and Planning – Analyser le lien entre institutions et performance du système de santé: un cadre analytique et une illustration à travers deux systèmes de financement basé sur la performance au Burundi
Titre original: Studying the link between institutions and health system performance: a framework and an illustration with the analysis of two performance-based financing schemes in Burundi
http://heapol.oxfordjournals.org/content/early/2012/12/07/heapol.czs124.short?rss=1
Maria Paola Bertone et Bruno Meessen, Département de Santé Publique, Institut de Médicine Tropical — Anvers (Belgique)
Les arrangements institutionnels des systèmes de santé et les incitants que ces arrangements déterminent sont de plus en plus reconnus comme essentiels pour favoriser ou entraver la performance dans le secteur de la santé. Analyser les interventions au niveau du système de santé d’un point de vue institutionnel peut contribuer à une meilleure compréhension des différents chemins et processus qui contribuent à déterminer les résultats de ces interventions.
Dans cet article, nous proposons un cadre analytique basé sur des éléments de New Institutional Economics (Nouvelle Economie Institutionnelle). Ce cadre suggère sept dimensions pour l’analyse : les institutions, les mécanismes d’application des institutions (enforcement mechanisms), les droits d’opportunité et de décisions des acteurs, les incitants, l’interaction entre la motivation extrinsèque et intrinsèque, les changements de comportement, et la performance organisationnelle. À titre d’illustration, nous appliquons le cadre à l’analyse des (re)arrangements institutionnels mis en place par l’introduction des deux systèmes de financement basé sur la performance (FBP) au Burundi, en effectuant une comparaison empirique des deux études de cas. Il s’agit notamment des projets pilotes mis en œuvre dans les provinces de Bubanza et de Ngozi par Cordaid et l’Institut Tropical Suisse respectivement. Nous utilisons principalement des données qualitatives provenant de sources primaires (entretiens avec 34 informateurs-clés) et secondaires (revue documentaire), collectées en Novembre 2009, et nous les analysons en mettant l’accent sur les sept dimensions du cadre analytique. L’analyse des études de cas crée une description comparative des deux systèmes de FBP qui met en évidence les différences dans leur conception et design opérationnel, les difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre et les adaptations apportées.
L’application du cadre analytique pour l’analyse des résultats indique, à un niveau empirique, qu’un tel outil pourrait aider à identifier certaines leçons concernant les interventions dans le système de santé, telles que l’introduction du FBP. En particulier, pour ce qui regarde les deux projets pilotes de FBP au Burundi, l’article se focalise sur trois points : le rôle et l’allocation des fonctions telles que (i) l’achat stratégique et (ii) le coaching (ou support technique) ; et (iii) le rôle que l’approche « philosophique » et les valeurs de l’organisation de mise en œuvre, ainsi que la différence entre la rhétorique des principes théoriques et la pratique de l’implémentation jouent dans les deux projets FBP.
Du point de vue méthodologique, l’article propose un outil pour analyser les interventions au niveau du système de santé, au-delà de l’évaluation des effets finaux, mais en se focalisant sur les processus par lesquels la réforme des arrangements institutionnels affecte les résultats de ces interventions.
par Maria Bertone