Chers Collègues,

Dans la presse internationale, l’on trouve encore beaucoup de débats sur le financement de la lutte contre le SIDA et sur le plan du G8 pour la survie maternelle. Quelques extraits ci-dessous. L’accès aux médicaments pose également question. Plusieurs auteurs évoquent les liens entre politique étrangère et santé.

Bonne lecture.

David Hercot

Les articles ont été résumés par Basile Keugong.

La sélection a été réalisée par Kristof Decoster, Basile Keugong, Josefien Van Olmen, Wim Van Damme et David Hercot.


HIV/AIDS

1. NYT – At front lines, AIDS war is falling apart

DONALD G. McNEIL Jr ; http://www.nytimes.com/2010/05/10/world/africa/10aids.html

Sur le front, la lutte contre le SIDA est en déroute

McNEIL Jr décrit la situation de la lutte contre le VIH/SIDA en Afrique. En Ouganda, le nombre de personnes mis sous ARV est passé de 10 000 à 200 000 en moins d’une décennie -500 000 personnes nécessitent les ARV et chaque année 110 000 nouvelles infections ont lieu. Le Nigeria, le Swaziland, le Botswana et la Tanzanie ont enregistrés des pénuries en médicaments ARV. Chaque année, il y a 1 million de nouvelles infections alors que les fonds pour continuer le traitement ARV s’amenuisent. McNeil note qu’il est impossible de mettre en œuvre toutes les interventions permettant de faire face à l’épidémie de VIH/SIDA en Afrique pour 100 personnes mis sous traitement, 250 nouvelles infections sont enregistrées. En plus, il relève que si les 33 millions de séropositifs étaient américains, en se référant aux Nouvelles directives de l’OMS, les cliniciens les mettraient presque tous sous ARV. Mais aujourd’hui 4 millions seulement environ sont sous traitement. Bref, quelle image du VIH/SIDA dans les pays pauvres ? Sa réponse : De maigres squelettes (séropositifs) marchant dans les villes et villages, une pile de cadavres dans les morgues, les montagnes devenues des cimetières.

Nous publions ci-dessous une réaction de Mead Over du CGD à cet article.

En somme, l’analyse de Mcneil retrace les situations désastreuses des personnes séropositives en Afrique sub-saharienne, d’ailleurs catastrophiques dans certaines zones rurales. Certains patients recevant plus ou moins gratuitement les ARV meurent d’infections opportunistes dont la prise en charge n’est pas gratuite. Il est clair que les ressources des bailleurs sont insuffisantes au regard des besoins mais Mcneil n’analyse pas les responsabilités des pays. L’arrivée des fonds pour le VIH/SIDA talonnant voir dépassant même les budgets de tout le ministère de la santé a créé des situations qui restent aujourd’hui incontrôlables et qui consomment la majeure partie des fonds. La forte bureaucratisation et la multiplication des structures de coordination s’est faite au dépens du renforcement du système de santé pour prendre en charge correctement tout patient où il se trouve. Alors que 40% des patients tuberculeux sont séropositifs, les structures de prise en charge sont parfois encore séparées. Les mêmes personnes sont formées chaque année pas pour bénéficier de connaissances nouvelles mais pour avoir le perdiem. Travailler dans les programmes verticaux est plus avantageux et on parle de fuite de cerveau interne. Au Cameroun par exemple, Le Fonds Global a accordé 15 million d’euro environ pour 2010-2014, seuls 5,5 million (35,3%) sont dédiés à l’approvisionnement en médicaments et équipements. Le reste (64,7%) va de la gestion du programme, monitoring et évaluation à la recherche opérationnelle. Quelle est la situation de la prise en charge du VIH/SIDA dans votre pays ?

2. CGD – the AIDS war may not be falling apart, but is falling behind

Mead Over; http://blogs.cgdev.org/globalhealth/2010/05/the-aids-war-may-not-be-falling-apart-but-it-is-falling-behind.php

La lutte contre le SIDA n’est pas en déroute mais elle se laisse distancée

Cet article de Mead Over est une réaction à une série de 4 articles publiés par le New York Times la semaine passée.

· At Front Lines, AIDS War Is Falling Apart

· After Long Scientific Search, Still No Cure for AIDS

· As the Need Grows, the Money for AIDS Runs Far Short

· Cultural Attitudes and Rumors Are Lasting Obstacles to Safe Sex

D’abord il note que la croissance de l’aide international
e pour le VIH/SIDA s’est ralentie- de 25% entre 2004 à 2008 et à près de 5% par an après 2008 pour PEPFAR. Les conséquences malheureusement, sont le ralentissement du recrutement de nouveaux patients et leur mise sous ARV et la réduction des activités de prévention, et l’accroissement des décès. En Ouganda par exemple, moins de 25% de personnes nécessitant les ARV sont mis sous traitement chaque année. Dans d’autres pays, des études ont trouvé une mortalité de plus de 25% de personnes mis sous traitement après 5 ans (Sieleunou et al 2009). Mead Over montre que les activités de lutte contre le VIH/SIDA « ne rate pas la cible » -falling apart- comme soulignent les articles du New York Times mais étaient focalisées sur une « fausse cible » -falling behind. Par exemple, des messages génériques « abstinence, fidélité, condom », fausse interprétation de la baisse de la prévalence –parfois plus due à la forte mortalité des séropositifs qu’à un changement de comportement. Il propose d’accroitre les investissements du côté de la prévention pour avoir moins de patients à mettre sous traitement demain.

Au moment où les ressources baissent et que les pays à faible revenu éprouvent des difficultés à assurer le maintien des patients sous ARV et le recrutement de nouveaux patients -quelle serait d’ailleurs la situation dans 20-30 ans ?-, la recherche de l’efficience dans la conception des programmes verticaux s’impose. Quelles sont les inefficiences que vous avez relevées et comment améliorer l’efficience des programmes verticaux en Afrique sub-saharienne ?

US foreign aid

3. Blog 4 Global Health – Presidential Study Directive-7: Good start but more work needed

sbaruah1; http://blog4globalhealth.wordpress.com/2010/05/07/presidentialstudydirective/

La nouvelle politique d’aide étrangère américaine: peut mieux faire.

La semaine dernière, l’administration américaine a publié – bien involontairement – le document sur la stratégie de l’utilisation de l’aide extérieure des Etats-Unis. En effet, beaucoup d’acteurs avaient suggéré une plus grande cohérence et coordination de l’aide extérieure orientée vers le développement plutôt que la focalisation sur l’appui humanitaire comme par le passé. Le document dont voici le lien –leak of the draft Presidential Study Directive-7 -, élabore les principes et les stratégies qui vont permettre aux programmes américains coordonnés par l’USAID d’atteindre ces objectifs. Les auteurs s’interrogent sur le devenir des programmes antérieurs dont certains sont beaucoup plus humanitaires et même des nouveaux programmes tels que le « Global Health Initiative » et le « Food and Security Initiative » que la Secrétaire d’Etat a récemment défendu au Congrès.

Ainsi, les pays bénéficiaires devraient s’imprégner du contenu de cette nouvelle stratégie et réfléchir sur le devenir de leurs programmes ou projets humanitaires.

4. Plos Medicine – New Complexities and Approaches to Global Health Diplomacy: View from the U.S. Department of State

Kerri-Ann Jones; http://www.plosmedicine.org/article/info%3Adoi%2F10.1371%2Fjournal.pmed.1000276

Perspectives américaines sur la nouvelle complexité et les nouvelles approches de la diplomatie de la « santé globale »

Kerri-Ann Jones présente la perspective du département d’état américaine. Elle pense que les systèmes de santé peu performants ont un impact local sur la santé des populations mais sont également source de tensions politiques, économiques et sociales tant au niveau national qu’international. Les changements climatiques, la santé internationale, la sécurité alimentaire sont aujourd’hui des priorités pour la politique extérieure et la sécurité nationale des Etats-Unis. Cette nouvelle perspective a été déclenchée par la pandémie du VIH/SIDA où la réponse à été plus globale avec la création de PEPFAR et les contributions au Fonds Mondial. En Mai 2009, a été lancé le “Global Health Initiative”, un programme de 6 ans de 63 milliards US$ qui comporte les précédentes initiatives tels que le VIH/SIDA mais inclut de nouvelles par exemple la lutte contre la mortalité maternelle et infantile, le planning familial, les maladies tropicales négligées et le renforcement des systèmes de santé.

Maternal mortality and the G8 summit

5. Toronto Sun (opinion) – G8 maternal health campaign slow to take off

Heather Scoffield; http://www.torontosun.com/news/canada/2010/05/08/13878731.html

Le plan pour la santé maternelle du G8 traine dans les startings blocks

Heather Scoffield s’inquiète de la lenteur prise dans l’élaboration des plans pour le financement par le G8 de la santé maternelle. A quelques semaines de la tenue du Sommet du G8 au Canada, le débat est axé sur l’inclusion ou non de l’avortement et du planning familial. Les ministres des Finances avaient souligné que les pays les plus pauvres seraient inclus et que de nouveaux mécanismes de financement ne seraient pas envisagés. Les interventions à haut impact seront sélectionnées et concerneront les soins pré et post-nataux, le planning familia
l, la transmission du VIH et la vaccination et la nutrition. Il faudrait environ 4 milliards US$. Les pays riches ont également promis 30 milliards US$ pour faire face aux changements climatiques et 20 milliards pour la sécurité alimentaire. Au moment la crise frappe la Grèce et que le déficit s’accroissent dans les pays riches, les promesses seront-elles tenues ?

Notons que deux pays Africains seront invités au G20 en juin, l’Ethiopie et le Malawi. Le débat continue de faire rage sur le continent américain sur l’opportunité ou pas d’inclure l’avortement assisté dans les interventions à haut impact. Dans le même temps, la Banque Mondiale a adopté son plan pour la santé reproductive de 2010 à 2015.

Performance based financing

6. CGD – HIV/AIDS Monitor: Are Funding Decisions Based on Performance?

David Wendt; http://www.cgdev.org/content/publications/detail/1424030/

SIDA : Les décisions sont elle guidées par la performence ?

Les auteurs analysent le financement à travers le modèle de “Payement à la performance” par PEPFAR, le Fonds Mondial et la Banque Mondiale. Les expériences du Mozambique, de l’Ouganda et de la Zambie sont décrites. Le rapport analyse les bénéfices, les difficultés et les opportunités de cette approche pour l’efficacité de l’aide et passe en revue les effets pervers.

On note un engouement de l’utilisation de cette approche en Afrique sub-saharienne soit de façon focalisée sur des programmes tels que le VIH/SIDA ou plus largement les indicateurs de santé. Il s’agit d’une approche qui évolue déjà depuis quelques années mais qui devrait être améliorée. En parcourant les expériences des pays décrites dans ce rapport, cela permettrait d’innover et d’éviter les effets pervers.

Global Health

7. GHE – Council conclusions on the EU role in Global Health

Global Health Europe; http://bit.ly/b47ZQi

Conclusions du conseil de l’UE sur la santé mondiale

Le conseil de l’Union Européenne (UE) a entériné, en 15 conclusions, son rôle dans la santé mondiale. Pour l’UE, la santé fait partie des droits de l’homme et est indispensable pour une croissance et un développement équitable et durable y compris la réduction de la pauvreté. En vue d’améliorer la santé mondiale l’UE donne clairement sa position sur des points tels que les déterminants socio-économiques de la santé, les défis des Objectifs du Millénaire pour le Développement, le renforcement des systèmes de santé, la réduction des paiements directs à travers des mécanismes de financement plus équitables.

8. Plos Medicine – Can Foreign policy make a difference to health?

Sigrun Møgedal, Benedikte L. Alveberg; http://www.plosmedicine.org/article/info:doi/10.1371/journal.pmed.1000274

La politique étrangère peut elle guérir à la santé ?

Dans cet article de la série de PLOS sur la diplomatie Sanitaire mondiale, les auteurs font allusion au lancement en 2006 de l’Initiative de Politique extérieure et Santé Internationale par 7 pays : Afrique du Sud, Brésil, France, Indonésie, Norvège et Sénégal. L’objectif était d’initier des débats sur les relations ente la santé et les politiques extérieures et aujourd’hui la santé est à l’agenda de toutes les politiques extérieures des pays. L’OMS devrait s’adapter aux nouvelles réalités pour améliorer la gouvernance en matière de santé dans le monde. Les Etats membres doivent diriger et aider l’OMS à assurer efficacement ces fonctions normatives et de définition des directives. Toutefois, les policymakers devraient connaître les options politiques qui s’offrent à eux et l’impact de ces politiques sur les indicateurs de santé afin de pouvoir faire des choix informés.

9. Lancet – International recruitment of health personnel

Allyn L. Taylor, Lawrence O. Gostin; http://www.lancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(10)60596-X/fulltext

Recrutement international du personnel de santé

Un draft du code global de pratiques sur le recrutement international des personnels de santé sera à l’agenda cette semaine de l’Assemblée générale de la santé qui regroupe 193 pays pour résoudre les problèmes de migration internationale des personnels de santé des pays à faible revenu vers les pays développés et les effets sur les systèmes de santé. L’Afrique par exemple a 24% de la charge mondiale des maladies et 3% de personnels mondiaux en charge de la santé. La fuite des cerveaux
continue de s’aggraver du fait de la coexistence des facteurs attractifs dans les pays développés et des facteurs d’émigration dans les pays à faible revenu (salaires bas, mauvaises conditions de travail, absence de plan de carrière…). Ce code est une étape importante dans la régulation et la gouvernance internationale en matière de ressources humaines.

10. Lancet (Letters) – the Health Impact Fund

Amitava Banerjee aEmail Address, Thomas Pogge b, Aidan Hollis; http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(10)60736-2/fulltext

Le Fonds d’Impact de santé (3)

Les auteurs ont publié un commentaire en réaction à un article du Lancet qui soulignait que les incitants offerts aux industries pharmaceutiques pour appuyer le développement des médicaments dans les pays sous-développés n’étaient pas nécessaires. On ne peut pas se fier uniquement à la bonne volonté des multinationales qui ont des obligations vis-à-vis de leurs actionnaires. Voir ici #7 et ici #9 pour les infos antérieures.

11. BMJ – Making it local

Karen McColl; http://www.bmj.com/cgi/content/full/340/may12_3/c2470

Produire localement

Karen McColl analyse l’engouement ces dernières années, pour la création de sociétés pharmaceutiques (environ 120 sociétés dans 37 pays) en Afrique pour la production locales des médicaments. En effet, plus de la moitié de la population dans certains pays n’a pas accès aux médicaments essentiels et les Ministres africains de la santé se pencheront sur le sujet lors de l’Assemblée mondiale de la santé à Genève (17 au 22 Mai 2010). L’article fait un aperçu de la production des médicaments en Afrique. En effet, moins de 1% des médicaments contre le paludisme et le VIH/SIDA sont produits localement (paradoxalement 80% des cas de paludisme et 60% des cas de VIH/SIDA surviennent en Afrique sub-saharienne). La semaine passée, nous relations le cas de Quality Chemical Industries en Ouganda, la toute première en dehors de l’Afrique du Sud -70% de toute la production de l’Afrique sub-saharienne- à avoir la certification de préqualification par l’OMS, mais qui éprouve des difficultés à concurrencer les médicaments importés moins chers. La majorité de la production locale n’est en fait que le conditionnement des produits finis importés.

Nous pensons qu’il serait très difficile pour chaque pays de développer sa propre production locale de médicaments en restant compétitif d’une part, et en respectant les normes internationales de qualité d’autre part. Une meilleure coordination pour une production au niveau sous-régional (UDEAC, CEMAC, CDEAO…) serait plus efficiente et garantirait un marché suffisamment large et donc capable de concourir avec les multinationales. Les pays se pencheraient beaucoup plus sur les stratégies d’approvisionnement et de distribution pour assurer un accès aux médicaments pour tous. Quel est votre point de vue ?

12. Reuters – India, Brazil challenge EU at WTO over drugs

Reuters; http://www.alertnet.org/thenews/newsdesk/LDE64B1O6.htm

Médicaments : L’Inde et le Brésil s’opposent à l’UE à l’OMC

L’inde et le Brésil ont porté plainte à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) contre l’Union Européenne (UE) et la Hollande qui saisissent au niveau de leurs ports les médicaments génériques destinés aux pays pauvres, perturbant l’offre de soins dans ces pays. Le problème est le choix des pays entre les spécialités fabriquées par les firmes et les génériques moins chers. Les pays riches se basent sur les droits de propriété intellectuelle alors que ces génériques sont légaux dans les pays d’origine et de destination. Pour l’UE, les saisies sont destinées à lutter contre les médicaments contrefaits. Les 2 parties ont 60 jours pour résoudre le problème, sinon l’OMC mettra sur pied un comité d’experts pour examiner la plainte.

Other diseases in developing countries

13. Guardian – Mental illness and the developing world.

Andrew Chambers; http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2010/may/10/mental-illness-developing-world

Les maladies mentales, négligées dans les pays en développement

Le Guardian note que les maladies mentales comptent parmi les premières causes de morbidité et d’incapacité mais suscitent très peu d’intérêt de la part des gouvernements et des ONG. D’abord, l’aide est basée sur des clichés facilement vendables et suscitant l’empathie des populations et il est donc difficile d’en trouver pour les maladies mentales. Elles comptent pour 14% des tous les DALYS et ne reçoivent que moins de 1% du budget de la santé dans la plupart des pays. En Grande-Bretagne, 70% des malades mentaux subissent des stigmatisations. En Afrique sub-saharienne, la situation est peu reluisante et les patients n’ont en général recours qu’aux guérisseurs traditionnels qui interprètent la maladie mentale comme « un mauvais sort ». En 2008, l’OMS a lanc
é l’initiative
Mental Health Gap Action Programme (mhGAP) et certaines ONG –BasicNeeds, Minds for Health-. Un plus grand plaidoyer est nécessaire pour susciter un intéressement du public, des ONG et des gouvernements pour maladies mentales et que les politiques conséquentes et le financement suivent pour qu’enfin les malades mentaux puissent avoir accès aux soins adéquat.


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